L'armada de marbre by Gareth L. Powell

Auteur:Gareth L. Powell [Powell, Gareth L.]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Denoël
Publié: 2021-04-01T13:55:46+00:00

33

Ona Sudak

Tandis que les vaisseaux blancs fendaient les dimensions supérieures, j’allai me reposer. Une vieille habitude que j’avais prise durant la guerre. Pendant un combat, on ne sait jamais quand la prochaine occasion de dormir se présentera, aussi de nombreux marins trouvaient-ils plus prudent de piquer une sieste lors des périodes d’inactivité.

Je me réveillai alors que nous rebasculions dans l’univers.

« Sommes-nous arrivés ? »

L’ours se trouvait là où je l’avais laissé, sur l’estrade au centre de la passerelle circulaire.

Pas encore.

« Où sommes-nous ? »

La bête velue brandit une griffe en direction du mur et une carte stellaire en trois dimensions apparut, rehaussée d’une ligne rouge indiquant notre trajet, de Camrose à l’endroit où le Chien à Problèmes avait découvert l’espèce de homard qui avait tellement perturbé mes hôtes. À peu près à mi-chemin, un petit système était en surbrillance. Je ne comprenais pas la langue dans laquelle les notations étaient rédigées, mais je reconnus l’étoile grâce à sa position : ses coordonnées étaient à jamais gravées en lettres de feu sur mon âme elle-même.

« Pelapatarn. »

C’est exact.

Le froid me saisit la nuque telle une main spectrale. Je n’étais pas revenue depuis le bombardement.

« Pourquoi m’avoir amenée ici ? » Était-ce pour me narguer ou pour me punir ? L’espace d’un instant de stupeur, je m’imaginai naufragée sur le sol radioactif et gorgé de cendres, au milieu des conséquences mortelles de mon acte.

Observez.

Les murs sphériques s’évanouirent, remplacés par la représentation tactique de l’espace autour du vaisseau. De lointaines étoiles brillaient comme des clous enfoncés dans le ciel. Au-dessus de nous, la planète était un œil chassieux, sa surface obscurcie par une cataracte de nuages maladifs.

Mais ce n’était pas elle qui avait retenu l’attention des astronefs blancs. Devant nous se trouvait une grappe de vaisseaux de guerre du Conglomérat. Deux Scimitars et une poignée d’Hyènes. Ils avaient été déployés ici pour protéger ce système : leur présence autour de cette nécropole était un rappel symbolique de la victoire finale et de l’armistice chèrement acquis par la Généralité.

Sitôt les nouveaux arrivants détectés, le groupe du Conglomérat vira de bord. Mais il était déjà trop tard. Les poignards blancs passèrent au milieu sans même décélérer. Un déluge de projectiles semblables à des éclats de verre s’abattit sur les appareils plus petits et réduisit leurs couches externes en charpie. Puis l’un des Scimitars se rua sur nous. Redoutant une collision, j’eus un mouvement de recul et me retrouvai bouche bée lorsque la proue affûtée de mon vaisseau s’enfonça en plein dans la coque de l’autre et la traversa de part en part. J’eus une vision passagère de naufrage, d’explosions et de volumes intérieurs. Puis ce fut terminé et, déjà, nous poursuivions notre route.

Je me tournai vers l’arrière de la passerelle et vis les deux moitiés du Scimitar diverger en laissant dans leur sillage une traînée de câbles, de mobilier et de cadavres. Le second Scimitar avait été mortellement touché par les tirs et dérivait en direction de l’atmosphère. Derrière lui, les Hyènes avaient été réduites en nuages de débris en expansion.

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